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Architecture et urbanisme à Paris

La Samaritaine

Comme le titrait Jean-Jacques Larochelle dans un édito engagé du journal Le Monde, le projet de l’équipe japonaise SANAA pour la réhabilitation de la Samaritaine est soit une « façade tout en transparence pour les uns, « rideau de douche » pour les autres ». Le débat entre les pour et les contre qu’on pensait terminé a été relancé par la décision du tribunal administratif de la semaine dernière invalidant le permis de construire du projet Samaritaine relatif à l’îlot Rivoli. De Christian de Portzamparc à l’Académie d’architecture, les architectes se mobilisent pour la défense de SANAA tandis que la Société pour la Protection des Paysages et de l’Esthétique de la France (SPPEF), qui avait posé le recours contre le permis de construire, elle, se félicitait du jugement. Le débat se déplace donc doucement vers une lutte entre les gentils contemporains progressistes et les méchants conservateurs réactionnaires, mais est-ce si simple que cela ? Je ne le crois pas. Démonstration. Une décision de justice motivée. Ce qui est intéressant dans la décision justice, c’est la réelle motivation de celle-ci qui va au-delà de la caricature faite par les défenseurs du projet de SANAA. Mais qui l’a réellement lue et comprise ? Pour celles et ceux que cela intéresse, elle est disponible ici. Que nous dit-elle exactement ? Que le jugement est fondé sur le droit et non sur des critères esthétiques contrairement à ce qu’affirme un ancien ministre de la culture qui aurait mieux fait de se taire. Que le permis de construire contrevient à l’article UG.11.1.3 du PLU parisien. Qu’en aucun cas, cet article n’oblige » le mimétisme des façades et que l’architecture contemporaine a sa place à Paris », mais qu’il convient néanmoins de respecter le « tissu existant, en prenant en compte les particularités morphologiques et typologiques des quartiers ». Dénigrer le jugement en estimant que le tribunal avait une » approche étroite « , c’est se tromper de combat. Preuve en est, c’est ce même tribunal qui a rejeté le recours contre les deux autres permis de construire des îlots « Sauvage » et « Seine ». Le tribunal administratif n’est pas là pour juger du beau ou du laid, mais du droit. L’étroitesse d’esprit ne vient pas, comme nous allons le voir, de ceux que l’on croit. Une double faute politique. Dans son jugement, le tribunal administratif a démontré qu’il y avait une méconnaissance de l’article UG.11.1.3 du PLU parisien pour justifier l’annulation du permis de construire. Les gentils contemporains progressistes y voient un jugement esthétique alors qu’il n’est question que droit. Le vrai débat serait de critiquer, non pas le décision de justice, mais la nature même de cet article du PLU. C’est lui qui est restrictif, limitatif, qui cloisonne, plus qu’il n’ouvre. La mairie de Paris ne peut s’en prévaloir quand cela l’arrange pour un projet de petite ampleur et s’asseoir dessus quand cela sert ses intérêts et ceux des groupes privés puissants. Il ne doit pas y avoir pas de grands architectes Pritzkerisés autorisés à tout – quand bien même la justesse, l’intelligence ou la qualité de leur projet, la question n’est pas là- et d’autres architectes, plus modestes, obligés eux d’ajuster leur projet au bon vouloir de l’instructeur ou de l’Architecte des bâtiments de France. Par ailleurs, l’autre faute résulte de la place des citoyens dans le débat public. Non pas que cela soit une faute en soi mais on ne peut d’un côté valoriser le débat participatif, inviter les Parisiens à venir débattre, à s’emparer des sujet qui les concernent et de l’autre côté, rejeter l’avis – en l’occurrence le SPPEF dans le cas concerné – de ceux qui ne sont pas d’accord avec vous. ____________________________ En conclusion, le débat ne doit pas se situer pas entre les gentils contemporains progressistes et les méchants conservateurs réactionnaires, entre le bien et le mal, entre le beau et le laid, mais entre le politique et le droit. Si les architectes trouvent que le PLU parisien ne permet pas de faire de l’architecture contemporaine, qu’ils se battent pour le faire changer. Opposer aux requérants une supposée modernité du fait que le projet de la Samaritaine soit de SANAA résulte d’une vision étriquée et réduite de ce que devrait être le débat et la place de l’architecture contemporaine à Paris. Par ailleurs, il est regrettable que le SPPEF ne s’attaque systématiquement qu’à des projets de grandes ampleurs, médiatiquement porteur alors que tous les jours, la laideur gagne du terrain de Paris comme le souligne avec justesse le réalisateur Jean-Pierre Jeunet dans une interview donnée à 20 minutes en janvier dernier : « Le long-métrage français, c’est quand même à 90% l’apothéose de la laideur et ça ne dérange personne. J’appelle ça le syndrome de la Pyramide du Louvre et des chiottes Decaux. La pyramide du Louvre, en verre, ça ne peut pas être plus beau et ça avait fait tout un scandale. Les chiottes Decaux, c’était des horreurs, mais j’ai jamais lu une critique négative. La laideur ne dérange personne et la beauté choque, et ça c’est très français. »

La pierre de taille

RÉALISATION D'UN PAVILLON EXPÉRIMENTAL EN PIERRE DE TAILLE, MATÉRIAU LOCAL ET RÉUTILISABLE SI EMBLÉMATIQUE DE LA CAPITALE Créé en 2015, le Collectif Pierre réunit différentes compétences (architectes, ingénieurs, compagnons tailleurs de pierre, appareilleurs) autour de l’envie de réhabiliter le matériau pierre dans l’architecture et la construction contemporaine. Son ambition est à la fois théorique, pédagogique, et pratique. Il s’attache à décloisonner des savoirs et compétences aujourd’hui majoritairement confinés à la restauration du Patrimoine et à les irriguer dans le champ de l’architecture contemporaine ______________ La Ville de Paris tire en grande partie son unité et son identité de la présence du matériau pierre. De sa création jusqu’au milieu du XXe siècle, la pierre a fait partie des matériaux de construction de prédilection en raison de l’importante présence de pierre calcaire sur son territoire. Si la ville en se développant s’est peu à peu installée sur ses carrières, d’autres gisements en activité perdurent encore aujourd’hui, à l’instar des carrières de Saint-Maximin dans l’Oise ou de celles de Noyant à la frontière de l’Île-de-France et de la Picardie. Alors qu’au XIXe siècle la transformation de Paris en capitale moderne s’est appuyée sur un cahier des charges très précis de matériaux pour l’architecture et l’espace public, force est de constater que la question des matériaux à employer dans la réalisation du Grand Paris est reléguée à un second plan. Ainsi, bien que le mode de production de la ville contemporaine se soit radicalement transformé comparé à celui du XIXe siècle, l’usage de la pierre est toujours pertinent pour le collectif Pierre. Dans le contexte actuel d’indispensable prise en compte des enjeux environnementaux, la question du réemploi du matériau pierre trouve un écho particulier. En tant que matériau naturel et local, il ne nécessite aucune énergie pour sa fabrication, peu pour son façonnage et son transport, et se distingue par ses qualités naturelles d’inertie thermique et de pérennité. Comme en témoigne l’important patrimoine en pierre, ce matériau s’illustre par sa capacité à durer dans le temps, à être réemployé, ou facilement recyclé, et par là-même permet de poser un autre regard sur le développement durable. De nos jours, les techniques de façonnage et de mise en œuvre du matériau pierre perdurent et se modernisent notamment par l’utilisation de nouvelles technologies (robotique, 3d). Pourtant ces savoir-faire d’excellence si spécifiques à la France restent essentiellement cantonnés aux chantiers de restauration du patrimoine. De même, les carrières de pierre de la région parisienne ont optimisé leur système d’extraction mais ne trouvent que peu de marchés en dehors des chantiers de restauration des monuments historiques, au point qu’il leur est aujourd’hui parfois plus rentable d’en faire du granulat pour la fabrication du béton ou de libérer des espaces d’enfouissement pour stocker des déchets inertes. En d’autres termes, l’usage du matériau n’a paradoxalement jamais été aussi anecdotique alors que les techniques d’extraction et de façonnage n’ont jamais été aussi perfectionnées et son coût par là-même maîtrisé. Leur candidature à Faire Paris s'inscrit dans le prolongement d’un workshop ayant pris place en avril 2016 à l’Atelier International du Grand Paris. Mu par la volonté de questionner la possibilité d’un usage contemporain du matériau, ils ont réuni à cette occasion étudiants, architectes et acteurs de la filière pierre (constructeurs, carriers, entreprises…) désireux de partager leurs connaissances et leurs savoir-faire. Faire Paris représente pour le collectif Pierre l’opportunité unique de poursuivre cette expérience et de confronter ces réflexions à la réalisation d’un prototype échelle 1, de pousser les technologies de façonnage pour permettre d’inventer de nouvelles formes et ornements et d’amener le public à poser un regard nouveau sur ce matériau local et réutilisable si emblématique de la capitale. Source ici.

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